L’appel à l’aide des commerçants aux propriétaires

18 Avr, 2020 | Info

Les commerçants de Visé, à l’instar de leurs confrères du pays tout entier, traversent une grave crise. Faire commerce aujourd’hui relève d’une passion et d’une motivation sans faille. Outre ce combat quotidien, les « petits commerçants » doivent à présent faire face à une situation (et une crise) sans précédent, totalement inédite, et dont nul ne connaît l’issue (ni en termes de timing, ni en termes de conséquences). 

Les bailleurs font la sourde oreille

Les commerces sont fermés.  L’État a mis en place une aide, mais elle sera cruellement insuffisante face au défi financier qui attend chaque commerçant. Car les charges courent toujours, la marchandise dort dans les rayons, les commandes passées auprès des fournisseurs sont en attente de livraison et les loyers commerciaux sont toujours dûs, alors que les portes restent désespérément closes. Malgré les démarches de plusieurs commerçants visétois auprès de leur propriétaire, afin de réfléchir ensemble à la façon de trouver un terrain d’entente financier durant ces semaines (ces mois?) de fermeture obligatoire, bon nombre de bailleurs ne veulent rien entendre, se retranchant derrières les aides accordées par l’État et les perspectives de vente en ligne (qui sont une bien maigre compensation, faute de mieux, dans le contexte actuel).

Le droit du côté des commerçants ?

L’association du Commerce visétois lance un appel à une prise de conscience dans le chef des propriétaires de locaux commerciaux. D’après le cabinet bruxellois d’avocats d’affaires Olivier Bonhivers (interrogé par la DH le 03/04/2020), la cour de cassation a souvent appliqué la « théorie des risques », en décidant « qu’un bail était dissous lorsqu’il y avait impossibilité pour le preneur (commerçant locataire) de jouir de la chose louée conformément à la destination convenue, et de payer le loyer, par suite de force majeure » (ce qui est le cas avec le Covid-19). Il poursuit : “Il pourrait donc être considéré, sur base de la théorie des risques et de l’article 1722 du Code civil, […] que la jouissance de la chose envisagée dans le bail n’est plus temporairement possible. Or dans le cas d’espèce, le bailleur se voit, en vertu de réglementations nouvelles émanant d’une autorité compétente – et donc en vertu du fait du prince – dans l’impossibilité de fournir temporairement la jouissance promise au contrat. Ces nouvelles directives constituent donc dans le chef du bailleur un cas de force majeure. Dès lors qu’il ne s’agit pas d’une impossibilité définitive mais seulement temporaire, le contrat ne sera pas résilié mais seulement suspendu, ce qui entraîne une suspension du paiement des loyers.” 

Confirmation de haut vol

Un point de vue confirmé par Le journal des tribunaux édité par les éditions Larcier, une référence du monde juridique belge,. Dans cette étude, développée en détails sur 5 pages (la première de ce niveau), Mathieu Higny (avocat et collaborateur scientifique au Centre de droit privé de l’UCLouvain) rejoint le point de vue précédemment évoqué. Selon lui, si les lieux loués sont frappés d’une fermeture imposée par arrêté ministériel, il faut considérer que le commerçant locataire est libéré temporairement de l’exécution de ses obligations contractuelles (dont le paiement du loyer), tant que l’interdiction fédérale d’ouvrir est en vigueur.

Ouvrir le dialogue

Sans en arriver à une suspension du versement des loyers, qui pourrait aussi engendrer de grandes difficultés pour certains propriétaires engagés dans le remboursement d’un prêt, le Commerce visétois invite impérieusement les bailleurs à se montrer réceptifs aux demandes d’assouplissement concernant leurs loyers. Pourquoi pas en accordant à leur locataire une baisse temporaire, selon leurs possibilités, ou en étalant les montants non perçus en 2020 sur les mois qui suivront la reprise totale des activités ?

Sans recherche d’un terrain d’entente, dans cette période totalement inédite et particulière, nous risquons d’assister à de nombreux drames personnels et financiers au sein de notre cité. Et plusieurs magasins pourraient ne jamais rouvrir.

Le Commerce visétois.

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